Paradoxe?

Ergothérapie

Ce matin j'avais un rendez-vous au centre de réadaptation Lucie-Bruneau. Cela fait plusieurs fois que j'y vais pour voir des professionnels différents. En passant, ils sont vraiment super. Cette fois, j'avais une première rencontre avec une ergothérapeute.
Disons que ce n'est pas sans un petit sentiment de culpabilité que j'y vais. Premièrement, j'y arrive en vélo. Ensuite, on y croise des personnes avec cannes jusqu'à des quadraplégiques en fauteuil. Et moi, complètement mobile, ayant couru des côtes sur la montagne il y a à peine une heure, je suis référé à une ergothérapeute.

Je suis souvent évasif au sujet des symptômes de la sclérose en plaques et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, je ne veux pas attirer de pitié pour ma situation et je connais des cas bien pires que le mien. Deuxièmement, c'est une maladie que j'ai moi-même de la difficulté à comprendre car il y a tellement de flou et de variabilité d'une personne à l'autre et même d'une heure à une autre. Si je sens mes jambes lourdes après la sieste, qu'elles semblent ne plus répondre, c'est parce que j'ai couru deux heures sur le Mont-Royal ou un symptôme de la maladie? Petit à petit des choses se clarifient, beaucoup d'autres restent toujours floues. Finalement, quand on me demande "comment ça va?", qu'est-ce que je répond? "Bien, et toi?" Ou bien "je me sens épuisé, je vois flou, j'ai la nausée, et toi?"

Mais les choses ne vont pas si mal, après tout. Au juste, je me considère extrêmement chanceux. Le fait de faire du sport, m'aide beaucoup. Sur le long terme, certainement: des médecins vont même jusqu'à dire que l'exercice devrait être considéré comme une thérapie de modification de l'évolution de la maladie au même titre que les médicaments qui coûtent des dizaines de milliers de dollars par année . Mais l'exercice à un impact que je note dans l'immédiat! Si je me sens léthargique et épuisé et que j'arrive à me convaincre de sortir courir, pédaler ou nager, l'éveil vient très rapidement, en moins de 5 minutes et la fatigue se dissipe plus souvent que pas.

C'est non seulement un effet qui survient pendant l'exercice mais il dure même une heure ou deux après l'exercice. Mon raisonnement est que les mêmes hormones secrétées par notre cerveau qui nous empêchent de s'endormir après une séance d'exercice en soirée (cortisol? adrenaline? endorphines?) m'aident au niveau des symptômes de la sclérose en plaques. Le seul problème est que je ne peux faire de l'exercice sans arrêt tout le temps et la SP a son impact sur l'exercice même si j'essaie de l'oublier. L'intensité fini par réchauffer la température de mon corps et une chose qui est claire dans cette maladie est que la chaleur corporelle réveille les symptômes. Dans mon cas, je fini par faiblir, voir flou, avoir la nausée.

Je pense aussi que les sports monotones comme la course à pied, le vélo, la natation fonctionnent bien pour moi. Si j'ai besoin d'utiliser mes méninges, comme pour des sports d'équipe, par exemple, ce serait plus difficile et causerait rapidement de la fatigue. C'est la même chose des tâches banales ou j'ai besoin de réfléchir même un peu: faire l'épicerie, faire mes bagages, suivre une recette. C'est la raison pour laquelle je ne travaille plus depuis septembre passé.

Finalement, quand je parle de "fatigue" et d'"épuisement", ça n'a pas bien rapport à la fatigue que je connaissais dans le passé après une grosse séance d'entraînement ou après une très longue journée de travail intense. Elle est bien difficile à expliquer, mais j'essaierai du mieux que je peux, si vous êtes intéressés. C'est une grande lassitude, et une sensation d'être saoul, de ne pas être capable de se mettre d'images ou d'idées dans la tête. Elle est souvent accompagnée de vision floue ou de vision tunnel, de mal de tête comme si la tête était remplie de ciment et souvent accompagnée de nausée.

Mais je me sens pas toujours comme ça et j'ai une issue de secours qui marche parfois, l'exercice. D'ailleurs, les semaines les plus difficiles sont celles où j'ai fait beaucoup d'exercice ou une compétition la fin de semaine et que je dois me reposer pendant quelques jours. Le manque d'exercice régulier pendant ce repos se fait sentir rapidement.

Je ne voulais pas vous ennuyer avec ces histoires, mais je vois souvent des points d'interrogation dans les regards des autres et je me sens obligé de m'expliquer un peu et de ce fait ça me permet de comprendre moi-même ce qui se passe. Il reste toujours beaucoup de flou, mais en gros, c'est ça.

Pour revenir à mon rendez-vous en ergothérapie, après avoir déposé mon casque de vélo sur le bureau, l'ergothérapeute me pose plusieurs questions. Je soulève le paradoxe, à mes yeux, d'être venu en vélo pour une consultation en ergothérapie. Elle me rassure et procède à faire une évaluation de mobilité: toucher mes pieds, mettre mes mains derrière la tête, me tenir sur un pied puis sur l'autre, etc. Elle note un déséquilibre sur le pied droit plus marqué mais surtout, elle mentionne qu'elle peut m'aider à mieux gérer cette fatigue.  Elle répète que j'ai aussi peut-être de la spasticité dans les jambes. Je quitte avec des devoirs: un journal à compléter pendant deux semaines avec l'heure du réveil, de la sieste, du coucher, des repas, et les activités et le niveau ressenti de fatigue plusieurs fois par jour. Je la rencontre ensuite et on verra.

Est-ce que je l'ai déjà dit? Le centre de réadaptation Lucie-Bruneau est un vrai joyau. On n'est pas suivi par plusieurs professionnels mais par une équipe qui travaille ensemble: dans mon cas une éducatrice, un neuro-psychologue, une ergothérapeute et peut-être d'autres à venir. L'étage ou je reçois la majorité des services est dédié aux maladies évolutives soit principalement la sclérose en plaques mais aussi le parkinson et la sclérose latérale amyotrophique, la première étant la principale, la dernière étant plus rare et trop agressive pour pouvoir suivre des personnes à long terme.

Côtes

Sur un tout autre ordre d'idées, ce matin, avant mon rendez-vous en ergo de 9h, j'ai fait quelques côtes à la course avec Oliver, dont la pente de ski du CEPSUM deux fois. L'ultra-trail de Harricana est  à seulement 12 semaines d'aujourd'hui et comme un con, je me suis inscrit au 125 km. Aux conseils de l'héli-homme (l'homme qui défie la gravité), Fred, cette dernière côte est un bon entraînement. Effectivement, dimanche quand on l'a fait, je la sentais dans les cuisses et aussi un peu plus haut. Je vais donc essayer d'en faire un rituel du mercredi matin.

Paradoxe

Le titre de cet article est effectivement "paradoxe": d'un côté la maladie qui m'affecte cognitivement, au niveau de la fatigabilité, et même physiquement. D'un autre côté je cours et je pédale pendant plusieurs heures, bien plus que la moyenne de la population. Expliquer ceci à une personne sédentaire ou modérément active est bien compliqué mais qu'est ce je peux dire de plus.

Harricana

Et pour la course de sentier de Harricana, quoi dire?
  1. C'est la course la mieux organisée que j'ai eu la chance de faire: sentier ou route.
  2. Plusieurs bons amis y sont inscrits pour toutes les distances: 5 km, 10 km, 28 km, 65 km, 80 km et 125 km.
  3. C'est une levée de fonds importante pour la Société canadienne de la sclérose en plaques (SCSP, un organisme qui m'est fort utile à plusieurs niveaux.

Et cette dernier point est en fait une belle coïncidence et depuis j'essaie de ramasser des sous pour la société. Si vous voulez contribuez, vous pouvez le faire sur ma page.

Et la SCSP c'est quoi? C'est un organisme sans but lucratif dédié à aider les gens atteints de la SP au Canada. Le Canada est d'ailleurs champion mondial au niveau du pourcentage de personnes atteintes par cette maladie. L'argent récolté est distribué en grande partie pour la recherche afin de mieux comprendre la SP et ses origines et afin de trouver un remèdes, une portion est aussi distribuée aux chapitres locaux afin d'offrir des services aux gens atteints et leurs proches.

Merci!



Commentaires

Messages les plus consultés de ce blogue

Ça fait longtemps

Embarquement prioritaire

Harricana 2016 - à vos marques